De la Russie, on imagine surtout des fous prêts à voter pour Poutine, des alcooliques anonymes qui fleurissent à touos les coins de rue, des forces de l'ordre prêtes à frapper sans ménagement quiconque défendrait un peu trop virulemment les droits de l'homme. Si vous cherchez un regard moins caricatural sur la Russie d'aujourd'hui, je vous conseille le livre "La Russie nouvelle", de Lorraine Millot, correspondante à Moscou pour Libé.
Autour de chapitres thématiques, elle dresse le portrait d'une société qui nous est finalement peu familière. Celle des entrepreneurs qui rêvent d'argent et de voyages, celle des agriculteurs qui se battent pour redonner de la vie aux campagnes, celle des blogueurs. Les aspirations des Russes ressemblent aujourd'hui à celles des autres Européens : acheter une voiture, gagner sa vie, manger à sa faim, se reposer, voyager...Une véritable classe moyenne voit le jour.
Et dans la Russie racontée par ses habitants, Poutine est très populaire pour avoir rétabli l'ordre et le prestige de son pays. Certains y voient une explication : en 1989, après la chute de l'ex-URSS, la démocratie a été imposée à la Russie sans qu'elle se soit battue pour. On le voit avec l'Irak : imposer la démocratie n'est pas la meilleure manière de la faire accepter. D'où l'acceptation d'un système à la Poutine, corrompu, bafouant les droits de l'homme mais fondamentalement libéral. Un totalitarisme doux "qui tente de se convaincre lui-même qu'il ne fait rien de mal".
Un culte pour leur Premier ministre (et, il y a encore peu de temps, leur président) dont sont obligés de se vanter les nouveaux entrepreneurs du pays. S'ils n'adhèrent pas à Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, ils peuvent avoir à subir de gros problèmes (des poursuites pénales pour tout et rien, par exemple).
Malgré sa popularité, un ras-le-bol existe, notamment dans certaines campagnes. Ironie de l'histoire : certains villages sont privés de gaz ! Dans le pays où les ressources gazières rapportent des milliards d'euros, c'en est (presque) burlesque. Certaines écoles s'effritent également. En effet, en Russie, l'école est gratuite, mais les parents d'élèves paient le matériel pédagogique, font parfois le ménage et paient les réparations dans les locaux. S'ils sont pauvres, l'école l'est aussi. D'où une forte migration vers les grandes villes du pays.
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