jeudi 11 septembre 2008

L'Europe comme un jeu

Déjà plus de deux mois que je ne suis pas revenue poster quelque chose sur ce blog. Et pourtant, entre la guerre entre la Géorgie et la Russie, les débuts hésitants de la présidence française, la mort de Geremek, il y en aurait eu des choses à raconter. Alors je reviens très vite avec d'autres articles sur l'Europe.
En attendant, allez découvrir ce petit quiz, et bonne chance pour détrôner la première du classement : il va vous falloir un bon entraînement !
A très bientôt.

vendredi 27 juin 2008

"La Macédoine, c'est un pays ?"

De retour d'une dizaine de jours en Macédoine, un petit pays coincé entre la Grèce et le Kosovo. Un pays candidat à l'entrée dans l'Union Européenne, mais complètement méconnu en France. Petit tour d'horizon de ce que j'y ai vu, entendu et senti.




A quoi ressemble Skopje, la capitale du pays ? Imaginez une ville-cuvette, encerclée de montagnes très vertes, où l'air devient facilement irrespirable. Impossible de se représenter Skopje autrement que comme un ville bruyante. Les gens conduisent au klaxon, sur des routes complètement cabossées, et surtout, ils conduisent comme des fous (dixit une occidentale). Dès que vous vous éloignez des grands axes, vous pouvez aussi apercevoir de petites charrettes, tirés par des chevaux, qui sont souvent conduites par des Roms. Côté architecture, on sent l'influence communiste (et c'est pas un compliment :). La ville a été rasée par un tremblement de terre en 1963 et a dû être reconstruite à la va-vite.


Les minorités. En Macédoine cohabitent plus ou moins facilement différentes minorités. Les Albanais constituent 20 % de la population, les Roms un peu plus de 5 %. Jusqu'à 2001, les Albanais et les Macédoniens étaient au bord de la guerre civile. Quant aux Roms, une bonne partie d'entre eux vit à Cutka (l'orthographe est approximative, désolée, mon clavier n'a pas de signes cyrilliques), la plus grande ville de tziganes sédentaires au monde. Les statistiques évaluent le nombre de Roms installée dans cette banlieue de Skopje entre 20 000 et 40 000. Ce qui est choquant, c'est que les enfants des Roms sont utilisés pour mendier et ramener de l'argent chez eux. Beaucoup d'entre eux lavent les pare-brises aux carrefours, d'autres fouillent les poubelles à des heures tardives de la nuit, certains poussent des chariots pleins de bouteilles en plastique. Les bébés, alors qu'ils ont à peine deux mois, vivent déjà dans la rue, dans les bras de leur mère. C'et un spectacle désolant.

La religion. Qui dit pays avec de fortes minorités dit pays avec des disparités religieuses. Skopje est séparée en deux : d'une part, la partie macédonienne, qui va prier dans les églises orthodoxes et d'autre part, la partie albanaise, à majorité musulmane. Témoin de ces différences : une immense croix métallique, érigée en 2002 au sommet du Vodno, une montagne qui surplombe la partie macédonienne de la ville mais que l'on aperçoit des kilomètres à la ronde. Le but ? Montrer que la ville appartient aux orthodoxes. Le plus impressionnant, c'est la nuit, quand seule la croix est éclairée (des éclairages financés par qui ? mystère). Par effet de protestation, les mosquées ont poussé comme des champignons dans la partie albanaise de la ville.

Le rapport conflictuel avec la Grèce. Déjà en 1991, quand la Macédoine a proclamé son indépendance, la Grèce a refusé de l'accepter. La raison ? Un litige sur le nom et le drapeau du pays, la Grèce estimant que la Macédoine était le nom d'une de ses régions et pas celui d'un autre pays. Un compromis avait alors été trouvé et, depuis, la Macédoine est officiellement appelée la FYROM (Former Yougoslavia Republic of Macédonia). Rebelote en avril dernier, au sommet de l'OTAN à Bucarest (Roumanie). La Grèce refuse l'entrée de son voisin dans l'OTAN sous le nom de Macédoine. En Macédoine, les Grecs sont donc très mal considérés (en témoigne l'explosion de joie quand la Grèce a été éliminé de l'Euro de foot). Et sachez que les Français suscitent également peu d'amour depuis que la France qui, par la voie de Sarkozy, a apporté son soutien à la Grèce. Il faut dire que la Grèce pèse plus de contrats économiques que la Macédoine.

La vie politique. Les dernières élections législatives se sont déroulées le premier week-end de juin dans tout le pays, provoquant plusieurs affrontements, notamment dans la partie albanaise du pays. Des élections entachées de très nombreuses irrégularités : le vote a même dû être annulé dans plusieurs bureaux de vote, et les électeurs ont été rappelé vers les isoloirs en carton pâte quinze jours plus tard. Au final, c'est le chef de gouvernement sortant, Nikola Gruevski , un conservateur nationaliste, qui a été réélu avec la majorité absolue des sièges. Une première dans la courte histoire de cette petite république. D'ordinaire, le gouvernement est toujours obligé de faire des alliances pour gouverner. En l'occurrence, le parti au pouvoir VMRO-DPMNE va tout de même chercher à faire des alliances, pour rester dans la tradition et s'éviter des conflits inutiles. La question est de savoir avec quel parti albanais il va s'allier : avant les élections il gouvernait avec le DPA (Parti démocratique albanais) mais les urnes donnent l'avantage à l'autre parti albanais, le DUI (Union démocratique pour l'intégration). Reste à savoir ce que va décider le Premier ministre.

Et aussi...Je vous conseille la visite d'Ohrid, le "bijou de la Macédoine" selon Lonely Planet ;) ; appréciez aussi la sponsorisation de la Macédoine par T-Mobile ; goûtez les délicieuses cacahouètes qu'ils vous servent avec la bière ; achetez des tomates sur les marchés, elles sont succulentes ; goûtez la Moussaka sans légumes ; et ne comptez pas trop rapporter des souvenirs de Skopje : le pays n'est pas du tout adapté au tourisme et il est même difficile de trouver des cartes postales de la capitale. Bon voyage !

lundi 16 juin 2008

Non, non et non : l'Irlande vote contre le traité constitutionnel


Et c'est reparti comme en 2005. L'Europe, vous la voyez autrement qu'en vaste ensemble burotico-bureaucratique, dénié de toute considération sociale ? Et bien bon courage ! En Irlande, on a échappé au couplet sur les plombiers polonais, mais au final, le résultat est le même qu'en France et aux Pays-Bas en 2005 : NON. Non au traité constitutionnel, appelé traité de Lisbonne, avec 53,4 % des voix contre 46,6 % (53,1 % de partiipation). NON à l'Europe actuelle.


Pour une Europe qui se cherche une population (un peu plus) aimante, c'est un coup de massue, un de plus. Les Irlandais étaient les seuls chez qui la ratification du traité de Lisbonne passait par la voie référendaire. Bizarrement, ils sont les premiers à dire non.


Forcément vient la question du pourquoi-tant-de-haine ? En deux décennies, l'Irande est devenue une des plus belles réussites de l'Europe. Une croissance folle, un chômage en chute libre. Mais l'Europe, contrairement aux hommes politiques de chaque pays, ne promet pas monts et merveilles. Elle ne dit pas qu'elle va sauver votre quotidien. Elle n'a pas de visage sur lequel on peut cracher. Elle n'émeut pas, et on lui reproche tout. On lui reproche de ne pas être assez sociale (mais est-ce le but d'un traité constituionnel, d'être social ??), on lui reproche aussi de ne pas laisser assez de liberté aux entreprises ; on lui reproche de gommer les nationalités, on lui reproche son fonctionnement compliqué, ses hommes en costume dans des bureaux. Et puis, tous les chefs d'Etat de l'UE sont en faveur de sa construction, tous sont pour le "oui" à ce fameux traité constitutionnel alors forcément, ça a quelque chose de louche. Les élites disent oui, je dois sûrement dire non.






Alors, qu'est-ce qu'on fait maintenant ? Comment on explique que la France, l'Irlande et les Pays-Bas ont besoin de l'Europe ? Messieurs les nonistes, c'est quoi le plan B dont vous nous parliez tant en 2005 ? Certains pays, comme la République Tchèque, souhaitent qu'on enterre le traité là, quelque part entre Dublin et les lacs du Connemara. D'autres, comme la France sarkozienne, veulent que la ratification se poursuive, histoire de mettre la pression sur l'Irlande et de l'isoler. J'ai le souvenir qu'on avait le regard moins fier quand ce sont nous autres les Français qui avaient stoppé le processus la première fois. En fait, les politiques européens espèrent que l'Irlande revotera le même traité, avec quelques amendements, dans quelques mois. Il faut dire qu'en 2001, l'Irlande avait d'abord rejeté le traité de Nice, avant de l'applaudir un an plus tard. Mais est-on assez bête pour penser que cela sera toujours aussi simple ? Et bravo pour cette belle leçon de démocratie : on laisse parler les gens, mais quand ils se trompent, on les fait recommencer. D'ailleurs, Nicolas Sarkozy a qualifié ce triste "non" d'"incident". Pour celui qui se targait il y a un an d'avoir remis l'"Europe sur les rails", c'est pourtant un revers. Auquel il va falloir trouver une solution. Mais laquelle ?

dimanche 1 juin 2008

La Russie nouvelle


De la Russie, on imagine surtout des fous prêts à voter pour Poutine, des alcooliques anonymes qui fleurissent à touos les coins de rue, des forces de l'ordre prêtes à frapper sans ménagement quiconque défendrait un peu trop virulemment les droits de l'homme. Si vous cherchez un regard moins caricatural sur la Russie d'aujourd'hui, je vous conseille le livre "La Russie nouvelle", de Lorraine Millot, correspondante à Moscou pour Libé.

Autour de chapitres thématiques, elle dresse le portrait d'une société qui nous est finalement peu familière. Celle des entrepreneurs qui rêvent d'argent et de voyages, celle des agriculteurs qui se battent pour redonner de la vie aux campagnes, celle des blogueurs. Les aspirations des Russes ressemblent aujourd'hui à celles des autres Européens : acheter une voiture, gagner sa vie, manger à sa faim, se reposer, voyager...Une véritable classe moyenne voit le jour.


Et dans la Russie racontée par ses habitants, Poutine est très populaire pour avoir rétabli l'ordre et le prestige de son pays. Certains y voient une explication : en 1989, après la chute de l'ex-URSS, la démocratie a été imposée à la Russie sans qu'elle se soit battue pour. On le voit avec l'Irak : imposer la démocratie n'est pas la meilleure manière de la faire accepter. D'où l'acceptation d'un système à la Poutine, corrompu, bafouant les droits de l'homme mais fondamentalement libéral. Un totalitarisme doux "qui tente de se convaincre lui-même qu'il ne fait rien de mal".


Un culte pour leur Premier ministre (et, il y a encore peu de temps, leur président) dont sont obligés de se vanter les nouveaux entrepreneurs du pays. S'ils n'adhèrent pas à Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, ils peuvent avoir à subir de gros problèmes (des poursuites pénales pour tout et rien, par exemple).


Malgré sa popularité, un ras-le-bol existe, notamment dans certaines campagnes. Ironie de l'histoire : certains villages sont privés de gaz ! Dans le pays où les ressources gazières rapportent des milliards d'euros, c'en est (presque) burlesque. Certaines écoles s'effritent également. En effet, en Russie, l'école est gratuite, mais les parents d'élèves paient le matériel pédagogique, font parfois le ménage et paient les réparations dans les locaux. S'ils sont pauvres, l'école l'est aussi. D'où une forte migration vers les grandes villes du pays.

dimanche 25 mai 2008

And the winner is...

Contre toute attente (!), Sébastien Tellier, le sosie du rugbyman Chabal, a fini...18e de l'Eurovision 2008. And the winner is Dima Bilan (un Russe qui se la joue play-boy en dansant en bombant le torse) et c'est LA FOLIE parce que c'est la première fois que la Russie gagne cette magnifique compétition. Sur le podium figurent ensuite l'Ukraine et la Grèce.

Je sais pas si vous avez déjà regardé l'Eurovision du début jusqu'à la fin mais c'était ma première fois. Et ça donne pas envie de recommencer ! Surtout le moment où les pays votent. Pour comprendre, imaginez que la Serbie donne ses points à la Croatie et à la Bosnie, que la Suède donne ses points à la Norvège et la Norvège à la Suède, que l'Espagne salue le Portugal et inversement, que les pays baltes ne jurent que par la Russie et vous obtiendrez des scores minables pour l'Allemagne, la Grande-Bretagne ou la France (faut dire...) Enfin, ne soyons pas amers, après tout Dima Bilan est l'exemple à suivre pour tous ceux qui veulent aller au bout de leurs rêves (sic) : il avait déjà représenté son pays au concours de 2006 à Athènes et avait terminé...deuxième.

dimanche 18 mai 2008

La Belgique championne du travail au noir

Selon un rapport d’Eurostat publié en novembre dernier, un belge sur cinq travaillerait au noir, principalement dans la restauration. Un système complexe et bien rôdé où tout est programmé pour détourner la loi.





« Le travail au noir, c’est le sport national en Belgique ». Boris P., 25 ans, a ouvert un bar à Bruxelles il y a trois mois. Le secteur de la restauration, il le connaît par cœur : avant de devenir patron, il a travaillé pendant toutes ses études comme serveur. Tous les soirs, de 16 h à 3 h du matin, il jonglait entre bières et expresso. 11 heures de travail par jour pour un contrat qui en mentionnait 14 par semaine. « La majorité des étudiants suent sang et eau pour 7,5 € de l’heure» raconte Mathias F., 28 ans, associé de Boris. Selon le droit du travail belge, le salaire horaire minimum dans la restauration s’élève à 9,20 €. Un manquement à la loi qui ne révolte personne. Tout le monde sait qu’en Belgique, le coût du travail double après 18 h or, dans la restauration, difficile de finir sa journée avant. Résultat : aucun établissement membre de l’Horeca (sigle définissant l’hôtellerie, la restauration et les cafés en Belgique), hormis les grands restaurants gastronomiques, ne peut se payer le luxe de déclarer la totalité des heures effectuées par leurs employés. « Payer au noir une partie des salaires de nos serveurs est la seule manière de survivre dans l'Horeca » appuie Boris.


"Un jeu qu'il faut savoir jouer"


A les entendre, on croirait presque qu’en Belgique, le travail au noir est légal. 23 inspecteurs du travail arpentent pourtant la capitale pour démasquer les fraudeurs. Mais, selon Christiane Jadot de la direction du travail de Bruxelles, « leur tâche est ardue, particulièrement dans l’Horeca où le personnel change régulièrement », tout du moins officiellement. Officieusement, chaque matin, les employés signent une fiche de remplacement, ce qui leur permet de justifier leur présence au-delà des heures qu’ils déclarent. Mieux : ils bénéficient ainsi d’une protection sociale. Un système bien huilé où personne n’a intérêt à dénoncer l’autre : « Peu d’anciens employés au noir portent plainte parce qu’eux-mêmes peuvent être poursuivis pénalement » explique Christiane Jadot.

Semer les inspecteurs, « c’est un jeu qu’il faut savoir jouer », s’amuse Boris. Un jeu sous forme de casse-tête administratif. Les contrôleurs calculent savamment la quantité moyenne des produits courants censés être consommés dans le bar. Ces calculs se fondent sur le nombre de salariés, leur temps de travail déclaré et la fréquentation de l’établissement. En clair, les inspecteurs traquent jusqu’aux rouleaux de papier toilette. Offciellement, Boris achete 60 rouleaux chez son fournisseur, facture à l’appui, et 20 au supermarché pour déjouer les contrôles. Mais, même s’ils se font épingler, les sommes à verser ne sont pas astronomiques. «Un employé déclaré 14 heures par semaine nous coûte 10 000 € par an, calcule Mathias. Si on le déclarait à temps plein, il nous coûterait 25 000 €. Quand on sait qu’en général, les amendes tournent autour de 40 000 € et que les contrôles sont peu fréquents, le calcul est assez rapide !»

A l'occasion d'un petit voyage à Bruxelles, j'ai fait cette mini enquête avec l'adorable et adorée Aurélia Moussly, je précise histoire de ne pas m'octroyer la gloire de cet article toute seule. Et si ça vous plaît, sachez que la promo de l'ESJ s'apprête à sortir un mag sur Bruxelles qui sera GENIAL (si, si), et que si vous voulez en avoir un avant-goût, allez voir de ce côté-là...

dimanche 11 mai 2008

Ecouter l'Europe sur RFI






Le saviez-vous ? Depuis un petit mois existe Euranet, un réseau de radio européennes. Concrètement, Euranet n'est pas une station de radio à part entière, mais un vaste système de partage de programmes et de ressources à travers toute l'Europe. Les radios concernées s'engagent à diffuser quotidiennement entre 30 et 60 minutes d'émissions sur l'Europe. En France, vous pouvez les écouter sur RFI (Radio France International). Intitulé de l'émission : Accents d'Europe.

A travers Euranet, la commission européenne souhaite sensibiliser les auditeurs de toute l'Europe aux questions liées à l'actualité de l'Europe. Bon, évidemment, les auditeurs de RFI sont assez peu nombreux et, pour écouter au réveil une radio aux accents internationaux, ils doivent être déjà (un peu) intéressés par l'actu européenne. Ce qui a fait dire à un journaliste de Télérama que diffuser un tel programme sur RFI, c'était "comme vacciner un groupe de personnes déjà immunisées". Mais c'est déjà mieux que rien. Et puis, les programmes d'Euranet devraient être écoutables, téléchargeables, potcastables bref disponibles sur le net en juillet prochain.


Entre 12 et 19 millions d'auditeurs quotidiens


Petit retour en arrière. Un appel destiné à créer le consortium qui allait réunir les stations au coeur de ce projet a été lancé en juillet 2007. "Il s'agit d'un projet de coopérations de radios européennes afin de rapprocher les citoyens européens. C'est la première fois qu'il existe un projet paneuropéen de ce type. Une charte éditoriale garantit l'indépendance éditoriale des stations réunies dans ce projet", avait alors indiqué Margot Wallström, vice-présidente de la Commission Européenne et Commissaire en charge des relations institutionnelles et de la stratégie de communication.
Dans le consortium, RFI, on l'aura compris mais aussi la Deutsche Welle. Ensemble, ils ont signé en décembre 2007 un contrat de services avec la Commission Européenne pour un montant de 5.8 millions d'euros. Euranet regroupe aujourd'hui 16 stations, représentant 13 pays européens. Attention, en voilà la liste imbuvable : il s'agit de RFI et de ses trois filiales RFI Romania (Roumanie), Europa Lisboa (Portugal), RFI Sofia (Bulgarie), de la Deutsche Welle (Allemagne), de Polskie Radio (Pologne), de la RTBF (Belgique), de Radio Nederland Wereldomroep (Pays-Bas), de Magyar Radio (Hongrie), de la Bulgarian Radio (Bulgarie), de Punto Radio Castilla Leon (Espagne), de Radio Praha (République tchèque), de Radio Romania International (Roumanie), de Radio Slovenia International (Slovénie), de Skai Radio (Grèce) et Polskie Radio Szczecin (Pologne).
Du coup, entre 12 et 19 millions d'auditeurs devraient écouter quotidiennement les programmes d'Euranet. Dans le meilleur des cas, il ne reste plus qu'à intéresser 380 millions de personnes. Facile.

samedi 10 mai 2008

Un musée fantôme de l'Europe

400 millions d’Européens et aucun musée sur leur histoire commune. Depuis 10 ans, l’association Musée de l’Europe s’active pour en construire un à Bruxelles. Un travail de longue haleine.

Une oeuvre de Jörg Frank

Parler de l’Europe, ça n’intéresse personne. Vraiment personne ? En 6 mois, l’exposition « C’est notre histoire », dressée dans les immenses locaux de Tour&Taxis à Bruxelles et dédiée aux 50 ans de l’Union européenne (UE), a attiré 130 000 visiteurs. A l’origine du projet, l’association Musée de l’Europe, une société à but non lucratif (S.B.L) qui se bat depuis 10 ans pour installer à Bruxelles un musée retraçant l’histoire du vieux continent. « Cela prouve qu’il y a une attente du public », avance Tamara Goldstein, secrétaire scientifique. Les Européens connaissent peu l’Histoire de l’Europe, voilà pourquoi ils la chérissent moins ». Pour Nicolas Esgain, également secrétaire scientifique, "le succès de notre exposition dépoussière le concept de musée : oui, un musée peut être passionnant et ludique".


Dur dur d'être un musée de l'Europe


Un musée de l’histoire de l’Europe : si l’idée semble faire consensus, son contenu est sujet de polémique : « on se demande toujours quelle Histoire on peut raconter, s’interroge Nicolas Esgain, secrétaire scientifique. Doit-on évoquer, par exemple, si elles existent, les racines religieuses de l’Europe? » Reste à savoir si cela explique le nombre de portes fermées, qu’elles soient belges ou européennes, à la barbe de l’association : « J’y vois plusieurs raisons. Des raisons historiques : les musées symbolisent une identité nationale et non transnationale ; des raisons culturelles : comprendre la nécessité de montrer ce que les Européens ont en commun est récente ; et des raisons politiques. » La proximité des institutions européennes n’a pas insufflé de réel dynamisme : « C’est dommage car ceux qui visitent les institutions n’ont rien à se mettre de plus sous la dent que des salles vides». D’où l’idée, en 2005, d’installer ce musée dans les locaux du Parlement européen : « Nous avions passé un accord formel mais ils ont finalement préféré implanté un visitor centre qui explique le fonctionnement des institutions ».



Rendez-vous dans 15 ans

Depuis, le musée de l’Histoire de l’Europe se cherche un toit. Un toit à quelque 32 millions d’euros. « Notre fenêtre de tir est assez encourageante. Notamment parce qu'Hans-Gert Pöttering (le président du Parlement européen) souhaite installer une "maison de l'Histoire"» Nicolas Esgain est un des précurseurs du projet : « Au début, je pensais qu’édifier un musée était rapide. Mais des historiens ont prouvé qu’en moyenne, un musée naissait en 25 ans ! » Alors, patience et rendez-vous dans... 15 ans.

vendredi 25 avril 2008

Le président du Kosovo impliqué dans un trafic d'organes ?

D'accord, ce n'est plus vraiment d'actualité mais le sujet reste intéressant : le trafic d'organes est-il toujours une réalité dans l'Europe d'aujourd'hui ?





Avez-vous déjà entendu parlé du dernier livre de Carla Del Ponte, l'ex-procureure du tribunal pénal pour l'ex-yougoslavie (TPIY ) ? Il s'intitule "la chasse, moi et les criminels de guerre" et n'est pas encore publié en français, donc il faut maîtriser l'italien (ou alors, croire les critiques et journalistes qui l'ont lu pour nous). Bref, ce livre accuse certains dirigeants du Kosovo, dont l'actuel Premier ministre, Hashim Thaçi, de trafic d'organes. Un trafic qui aurait été opéré en 1999, avec les organes de 300 prisonniers serbes.


Aucune preuve vérifiée


Revenons en arrière. En 2003, Carla Del Ponte est alertée par des journalistes : ils prônent l'existence d'une maison où se seraient produits ces exactions. L'ex procureure demande que les témoignages soient vérifiés, et envoie sur place une mission de vérification. Résultat : des éléments médicaux s'avèrent être suspect mais aucune preuve n'est trouvée. En tout cas, la mission affirme ne pas avoir trouvé assez d'éléments pour ouvrir une enquête.

Pour une ex-procureure, et surtout pour une actuelle ambassadrice de la Suisse en Argentine qui a un certain devoir de réserve, baser un livre à charge sur des témoignages attire forcément les foudres. Dans son livre, elle avoue elle-même ne pas disposer de réelles preuves. Elle souhaitait que d'autres juges poursuivent l'affaire derrière elle. Sans succès.



Voilà pour le cas "Carla" (pour une fois qu'on ne parle pas de Carla B.). Qu'on adhère ou non à sa manière de sauter les deux pieds dans le plat, le livre de Carla Del Ponte a le mérite de parler du trafic d'organes. Aujourd'hui, le trafic d'organes n'est pas reconnu comme un "grand trafic", terme dont on affuble les trafics d'êtres humains, d'armes, de stupéfiants et de véhicules volés. Pourtant, il est une réalité.


Un foie à 125 000 dollars


On les appelle des bourses à organes : des sites Internet où sont vendus des organes. Ils sont de moins en moins accessibles. Au bout de la chaîne, la plupart du temps, la Chine et le Pakistan qui abreuvent le monde entier de reins, de foies et autres organes. Où les trouvent-ils ? En Chine, les condamnés à mort seraient dépouillés de leurs organes, le trafic s'appuyant sur une loi de 1984 qui autorise le prélèvement d'organes sur des condamnés à mort dont les familles ne réclament pas les corps. Ce que l'on ne dit pas c'est que des pressions sont exercées sur les familles pour qu'elles ne réclament pas les corps, quand elles sont au courant de l'exécution de leur proche. Il y a quelques années, un exécuté chinois rapportait environ 400 000 dollar. A ce rythme là, on comprend mieux pourquoi l'abolition de la peine de mort est loin d'être d'actualité...Et les autres organes - ceux qui n'appartenait pas à des condamnés à mort, ils sont le fruit d'un trafic où l'on peut promettre à des pauvres un boulot et où ils se réveillent quelques heures plus tard avec un rein en moins.
Et ces sites trouvent preneurs - très peu d'Européens (cela toucherait 5 ou 6 cas par an en France). Mais ils peuvent toucher des habitants du Moyen -Orient, par exemple, où la transplantation est interdite. Commptez 125 000 dollars pour un foie...


Où en est ce trafic aujourd'hui ? Les organisations scientifiques auraient fait pression sur les médecins qui s'adonnaient à ce genre de pratiques, et cela aurait diminué le trafic (difficile d'en parler autrement qu'au conditionnel). En effet, impossible de se passer d'un médecin pour faire une transplantation. Un trafic d'organes est particulièrement difficile à mettre en place - est-ce réellement possible à organiser dans un pays très pauvre ? En tout cas, qu'on se rassure, il paraît qu'en Europe, la traçabilité des organes est...totale.

vendredi 28 mars 2008

Fitna, le pamphlet provocateur contre le coran



Je vous parlais il y a trois jours du député populiste Geert Wilders (photo ci-dessus) et de son pamphlet contre le Coran, Fitna. Suite de l’épisode : ce petit film d'une quinzaine de minutes est diffusé sur Internet depuis hier. Aux Pays-Bas, on s’inquiète des retombées démocratiques et Jan Peter Balkenende, le premier ministre, a déclaré solennellement , "regretter" cette diffusion. "Le film amalgame islam et violence, nous rejetons cette interprétation".

Un film provoquant, provoquant et provoquant
Le film est particulièrement provocateur, ce qui ne lui donne aucune crédibilité. Certaines scènes sont choquantes (le cri d'un homme qui se fait égorger est insoutenable), d'autres traumatisantes. Sur fond de musique dramatique, on revoit les images des attaques du 11 septembre, celles des attentats de Madrid et de Londres. Evidemment, compilées, ces images sont d'une violence inouïe. La suite est une superposition de citations du Coran et de propos virulents de prêcheurs radicaux, souvent antisémites. On n'entend pas une seule fois la voix de Geert Wilders.

Mais quelle peut être la pertinence d'un tel film ? Des extraits du Coran sont traduits en anglais, mais ne devons-nous pas douter d'une traduction ouvertement provocatrice ? Et puis, comment interpréter un texte avec nos yeux d'occidentaux, qui plus est, dans notre monde actuel ? Le film Jesus Camp montre bien que, s'il y a des fondamentalistes religieux chez les musulmans, il y en a aussi chez les catholiques. D'autres scènes font réfléchir : le "God bless Hitler" barrant une pancarte ; la comparaison faite par une enfant voilée de trois ans et demi des juifs avec des cochons ; la volonté de certains imams de "dominer le monde". Mais, autant ces images sont choquantes et condamnables, autant elles sentent la propagande à plein nez pour forcer le spectateur à assimiler ces violences avec la religion musulmane. Faites vous votre propre opinion, et partagez la sur ce blog :



Alors que M. Wilders avait empêché tout visionnage préalable de son film, la question va désormais se poser de sa légalité. Selon le député, cette production est "convenable et n'enfreint pas la loi".

Les Pays-Bas craignent à présent une réaction violente dans le monde musulman. Dès l'annonce de ce projet, en novembre, des pays comme l'Iran ou l'Egypte se sont indignés, menaçant les Pays-Bas d'un boycott économique. Fin février, les talibans ont menacé d'attaquer les quelque 1 660 soldats néerlandais déployés en Afghanistan dans le cadre de la Force internationale d'assistance à la sécurité (ISAF) si ce "film insultant" était diffusé. De nombreuses associations musulmanes néerlandaises ont déjà appelé les fidèles au calme. (lu dans Le Monde)

mercredi 26 mars 2008

Eurovision : 50 ans de bonheur

Quoi, l'Europe ne vous passionne pas ? Vous avez beau protester, tout les ans apparaît sur nos écrans LA référence en matière de culture européenne. Oui, oui, un moment où des milliers, que dis-je, des millions d'Européens appuient frénétiquement sur leurs téléphones portables pour sauver leurs candidats. Vous l'aurez compris, petit zoom sur l'Eurovision. Pour se mettre en bouche, petit tour d'horizon de moments gravés dans la mémoire commune européenne (n'ayons pas peur des mots).

La chanteuse insoupçonnée. Saviez-vous que Séverine Ferrer, présentatrice émérite de Fan de dans les années 1990, avait représenté Monaco en 2006 ? Elle s'est (bizarrement) arrêté au stade des demi-finales.

L'ovni drag queen. L'an passé, l'ukrainien Verka Serduchka a déclenché une polémique en se travestissant en paysanne ukrainienne. Beaucoup se sont offusqués de la mauvaise image donnée des Ukrainiens. Andriy Danilko (c'est son vrai nom) s'est dit "écoeuré" par les critiques.


Eurovision 2007 Ukraine Verka Serduchka - Danzing


L'ovni tout court. Qui ne se souvent pas de Lordi, le champion finlandais en 2006 ? Appréciez au passage les commentaires de Michel Drucker.




La super choré. Et pour les froufous, les filles revenues à l'état sauvage lorsqu'elles ne portaient que des string couleur savane, l'Eurovision met souvent le paquet. Applaudissons ensemble l'ukrainienne Ruslana, en 2004, qui termina...première !



Ukraine Music - Eurovision 2004


La (fausse ?) blonde.
Il fut un temps où l'Eurovision était bien plus sage. Flash-back en 1965 où une certaine France Gall interprétait une "Poupée de cire, poupée de son" flamboyante. (si vous ne l'avez pas vu depuis un moment, préparez-vous psychologiquement au changement).


France Gall - Poupee De Cire, Poupee De Son

Ca plane (pas trop) pour lui. Y'en a qui auraient pu voir leur carrière brisée par l'Eurovision, comme Plastic Bertrand, qui avait fini 21e en 1987 avec "Amour, amour".


1987 Luxemburgo - Plastic Bertrand


Le malaaade, complètement malaaade. Reconnaîtrez-vous ce jeune chanteur, qui avec "Un jardin sur la Terre" finit 10e en 1971 ?

La grande gagnante (et grande oubliée). Voici la dernière vainqueur française, Marie Myriam, avec "L'oiseau et l'enfant", en 1977 . Nostalgie, quand tu nous tiens.



Marie Myriam__________Eurovision 1977


Le futur perdant. L'Eurovision se tiendra cette année du 20 au 24 mai, à Belgrade, en Serbie. Et voilà le représentant de la France cette année, j'ai nommé Sébastien Tellier. Y'a quelqu'un qui m'a dit qu'on n'allait pas finir premiers...En espérant que la représentation scénique sera (un peu) meilleure que le clip.



Sébastien Tellier - Divine [Le Clip] [Eurovision 2008]


Et maintenant, un peu de journalisme ! L'Eurovision existe depuis 1956. Ce grand rassemblement est organisé par l'Union européenne de Radio-Télévision (U.E.R), regroupant des chaînes de télévision de 74 pays, dont 54 pays d'Europe (pour la France, c'est France 3 qui s'y colle).
Quelques points du règlement indispensables pour devenir de bons téléspectateurs : la chanson doit être inédite, ne doit pas dépasser trois minutes (ouf), les artistes doivent avoir 16 ans minimum, et ils n'ont pas le droit de chanter en play-back. Le concours est ouvert à tout membre actif de l'UER, ce qui explique pourquoi l'Algérie, la Maroc, Israël ou encore la Tunisie peuvent participer.

Vive la solidarité européenne !
Pour accéder à la grande finale, trois moyens : être le pays organisateur, avoir de l'argent et faire partie du Big 4, autrement dit des quatre plus gros contributeurs (l'Allemagne, l'Espagne, le Royaume-Uni et la France) ou bien figurer en bonne position lors des demi-finales organisées quelques jours avant la finale. Et nous tenons là une des explications à la question que tout le monde se pose : pourquoi la France n'a t-elle rien gagné depuis 1977 ? (La première explication est peut-être à chercher dans le clip de Sébastien Tellier mais chut c'est un secret) Non, la vraie explication, ce serait la frustration des autres pays participants. En effet, l'attribution du titre est essentiellement faite par télévote. Or l'organisation de l'Eurovision a mal expliqué aux téléspectateurs le pourquoi du comment les pays du Big 4 sont exemptés de demi-finales (mais parce qu'ils ont de l'argent, on vous dit !). Du coup, les Européens ne votent jamais pour les 4 mal-aimés. Ah bravo la solidarité européenne ! Y'a plus qu'une solution : ne plus financer l'Eurovision, pour leur apprendre, à ces pseudo chanteurs même-pas-français-qui-se-permettent-de-gagner-quand-même.

A Chypre, 1+1 = 1

Espoir de réconciliation entre les Grecs et les Turcs, à Chypre. Pour la première fois depuis l’invasion turque, en 1974, les dirigeants des deux parties de l’île se sont rencontrés à Nicosie, vendredi 21 mars, sous les auspices des Nations Unies.



Autant l’avouer tout de suite : cette rencontre entre le nouveau président chypriote grec, Demetris Christofias, élu le 24 février et le dirigeant de la République turque de Chypre Nord, Mehmet Ali Talat était surtout symbolique. Aucune mesure en faveur d’une réunification rapide des deux parties de l’île n’a été annoncée. Mais les deux parties ont souhaité engager de nouveaux pourparlers - tout en évitant soigneusement les questions qui fâchent. "Nous voulons résoudre le problème chypriote dès que possible", s'est engagé Mehmet Ali Talat. Il espère un accord définitif "d'ici à la fin de l'année 2008". Quant au nouveau président communiste (le seul de l'Union européenne), Demetris Christofias, il a annoncé vouloir tendre "une main de l'amitié au peuple chypriote turc et à ses dirigeants". Pour la première fois, Grecs et Turcs semblent ne plus vouloir se tourner le dos.

Ouverture de la rue Ledra
Depuis lundi dernier, des groupes de travail et des commissions techniques planchent sur le sujet. Première mesure : la réouverture à la circulation de la rue Ledra (photo), à Nicosie, d'ici début avril, bien aidée par quelque 100.000 euros débloqués par la Commission européenne. Cette rue est une véritable artère commerçante, qui traverse du nord au sud la capitale chypriote. Pour le moment, elle ressemble à une course d'obastacles et de pièges, bordée par de multiples maisons et magasins abandonnés. Un premier point de passage, celui du "Ledra Palace", plus éloigné du centre ville, avait été ouvert il y a cinq ans. Depuis, plus rien. Ce sixième point de passage ouvert dans la ligne Verte (appelée ligne Attila côté turc), mur qui sépare le nord du sud du pays, devrait permettre "plus de communication entre les gens, pour réduire le fossé qui s'est creusé entre les populations", selon Demetris Christofias.

Un peu d'histoire
La rue Ledra illustre à elle seule la complexe question chypriote. Revenons en arrière. En 1960, Chypre se sépare de la tutelle britannique. Le Président est grec, le Premier ministre est Turc, mais la paix ne durera pas trois ans. Déjà à l’époque, des exactions intercommunautaires entre Chypriotes grecs et turcs avait initié le regroupement des populations au Nord et au Sud - la ligne verte est née en 1964. En 1967, la dictature des colonels s'installe en Grèce : plus question d'évoquer un rapprochement avec Chypre. Mais le 15 juillet 1974, les Colonels renversent la démocratie chypriote. L'armée turque vient apporter un soutien appuyé à la minorité turque du pays, et fait chuter la dictature grecque. Le problème, c'est que l'armée turque n'est jamais repartie et occupe toujours un tiers du territoire. A l'époque, elle en profite pour imposer par la force la partition de l'île. Le conflit fait environ 6.000 morts et des centaines de disparus. Depuis, les deux parties de l'île n'ont pas évoluées de la même manière. Si la République turque de Chypre Nord est reconnue par la seule Turquie, la République de Chypre Sud est partie intégrante de l'Union Européenne. Il y a quatre ans, les Chypriotes grecs votaient contre le plan de réunification de l'île proposé par le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan - Demetris Christofias avait fait campagne contre. De l'autre côté de l'île, les Chypriotes turcs avaient accepté ce plan.

Et après ?
Le rapprochement entre les deux dirigeants chypriotes peut-il vraiment avoir un impact à long terme sur la vie politique complexe de Chypre ? Sur le fond, les positions restent toujours aussi tranchées. M. Christofias était, comme son prédécesseur, Tassos Papadopoulos, un adversaire du plan Annan, qu'il trouvait à la fois impraticable et déséquilibré en faveur de la partie turque. M. Talat, au contraire, veut que ce plan reste la base des pourparlers. Principaux contentieux ? "Les droits de propriété pour les Chypriotes grecs qui ont été chassés en 1974 de leurs terres du Nord et pour les Turcs qui les ont remplacés, l'immigration en provenance de la Turquie, qui a transformé en minorité les Chypriotes turcs d'origine ; enfin, la présence, au nord, de plus de 30 000 soldats turcs." selon Le Monde. Autre souci : pour être élu, M. Christofias a eu besoin du soutien du parti Diko (démocrates de centre-droit) de Tassos Papadopoulos, partisan d'une ligne très conservatrice face aux Chypriotes turcs. Selon la presse locale, il aurait promis à ce parti trois ministères, dont celui des Affaires étrangères. D'ailleurs, l'un des proches conseillers du nouveau président, Georgos Loukaides, avoue : "Les choses deviennent plus difficiles chaque jour. Nous voulons proposer une solution pour montrer que la mauvaise volonté est du côté turc". Du côté turc, c'est la même ambiguité : "La Turquie ne veut pas de solution, car une solution forcerait la Turquie à quitter Chypre, estime Ibrahim Aziz, collaborateur de la chaîne de télévision privée Antenna, et opposant notoire au régime pro-turc du nord. Et Talat est une marionnette d'Ankara."

Reste donc à savoir si cette main tendue ne va pas s'effacer avec le temps. Prochains éléments de réponse dans trois mois.

mardi 25 mars 2008

Haro sur le Coran

On croyait l'affaire des caricatures de Mahomet révolue. Il n'en est rien. Avec son pamphlet contre le coran, prévu pour début avril, le député néerlandais Geert Wilders réveille de vieux démons.


(Le Danemark et les Pays-Bas sont chaque jour la cible de manifestations en Afghanistan contre les caricatures du Prophète et le film de Wilders. Photo AP)

« L’islam peut nous coûter notre liberté si nous n’agissons pas contre lui ». Une déclaration, un brin provocante, signée Geert Wilders. Aux Pays-Bas, en quelques mois, le nom de ce député populiste néerlandais, chef du Parti de la liberté (PVV), est devenu célèbre. La raison ? Fitna, un pamphlet contre le Coran qu’il a réalisé cet hiver. Le leader d’extrême droite projette de le diffuser le 1er avril sur Internet. Un film qui gêne (presque) tout le monde.


Provoquer : la raison d'être du film
Et pour cause ! Fitna est né uniquement pour provoquer. Arrêtons nous sur le titre, d’abord. En arabe, il signifie la discorde. Pour Wikipédia (et Dieu sait la véracité des propos tenus sur les pages de Wikipédia), « fitna » est « généralement considéré comme très difficile à traduire mais est considéré en même temps comme un tout englobant se référant à la fois aux mots schisme, sécession, anarchie et troubles ». Et pour Wilders, le titre fait référence au « mal » : «J’ai insisté pour utiliser une expression qui se trouve également dans le Coran. Pour moi, le Coran vénéneux est fitna ».

Les rumeurs, ensuite. Elles contribuent grandement à la peur qui entoure la sortie de ce pamphlet. Le top du top : dans les dernières minutes du film, le député brûlerait le Coran. Mieux, le film serait accompagné d’un dessin animé moquant le prophète. Mais, à vrai dire, personne n’a encore vu le moindre rush ! En fait, Wilders joue la provoc à fond et ça marche. Il va jusqu’à décrire le Coran, dont il avait réclamé l'interdiction en août 2007, comme « le Mein Kampf de la religion qui vise à éliminer les autres et les traite de chiens d'incroyants ». Avis aux amateurs :






Si Geert Wilders voulait qu’on parle de son film, c’est gagné. S’il voulait faire peur, c’est carton plein. Le film devait être diffusé sur www.fitnathemovie.com. Jusqu'à dimanche dernier, le site Internet montrait la couverture du Coran sur fond noir avec le texte : "Prochainement : Fitna". Preuve de l’angoisse qui entoure la sortie du film: le fournisseur d'accès Internet américain Network Solutions a suspendu, dimanche 23 mars, l’accès au site. "Network Solutions a reçu un certain nombre de plaintes qu'il est en train d'examiner concernant ce site". Pas de quoi arrêter Geert Wilders : "S'il le faut, j'irai distribuer personnellement des DVD sur le Dam ».


"C’est la responsabilité du peuple des Pays-Bas de l’arrêter"
Les autorités néerlandaises sont elles aussi très mal à l’aise. Dans ce pays, jamais vraiment remis des assassinats de Theo Van Gogh et de Pim Fortuyn, personne n'a oublié l'affaire des caricatures de Mahomet. De nombreuses ambassades danoises avaient été attaquées dans les pays musulmans. « C’est la responsabilité du peuple des Pays-Bas de l’arrêter ». Ahmad Badr al-Din al-Hassouna, le Grand Mufti de Syrie, a mis en garde les Européens « ne pas abuser de la liberté d’expression pour critiquer l’islam ».
Dans ce climat, le premier ministre chrétien-démocrate, Jan Peter Balkenende a demandé début mars au leader populiste de stopper son projet : « Je trouve importante la liberté d'expression mais je pense aussi aux possibles victimes, aux militaires, aux entreprises, aux ambassades, aux Néerlandais vivant à l'étranger". Au fond, le gouvernement cherche surtout à faire comprendre aux pays musulmans qu'il ne peut être assimilé à M. Wilders. Sur tous les fronts, les Pays-Bas sont en état d’alerte, "au cas où". Médecins sans frontières Nederland a même pris les devants en rapatriant des équipes du Pakistan.
Malgré les critiques, difficile d’interdire le film. Selon son auteur, Fitna ne déroge à « aucune règle de l'Etat de droit ». Geert Wilders a même proposé de le montrer en avant-première au coordinateur national de la lutte antiterroriste, à condition d'avoir préalablement la garantie qu'il ne serait pas censuré.


La polémique ne va pas s'essouffler demain. Dernière trouvaille de Geert Wilders : il accuse Jan Peter Balkenende d'avoir lui-même « provoqué et amplifié l'inquiétude », en faisant en sorte que «tout le monde soit au courant, de Tombouctou à l'Afghanistan». Un coup médiatique impressionnant.

dimanche 23 mars 2008

"Les Français ne savent pas mettre en scène l'Europe"

Le blog Coulisses de Bruxelles, ça vous dit quelque chose ? Ce blog, particulièrement bien documenté sur les dessous de l’Union Européenne (UE), est rédigé par Jean Quatremer depuis 2005. Un journaliste de Libération, correspondant permanent auprès des institutions européennes depuis 1992. Un grand journaliste, petites lunettes sur le nez, et une main qui passe et repasse dans ses cheveux. De passage à Lille, dans un amphi de la fac de droit à moitié rempli, il nous a raconté sa vision de l'Europe et des médias. Flash back.





Pourquoi vous intéressez-vous à l'Union Européenne ?

L'Europe est passionnante. On essaie d’y construire quelque chose de radicalement nouveau. Des guerres, il y en a toujours eu, mais réussir à s’entendre au quotidien entre personnes de cultures opposées, cela tient de l'exploit ! Cela rend l'UE profondément complexe, dans les moindres détails. Même un passage de témoin entre un Anglais et un Français est compliqué : l'un aura classé ses fiches en dossiers, l'autre en aura fait des piles sur son bureau. Cela peut paraître risible, mais c'est la vérité ! Les Allemands et les Français ont des façons si radicalement différentes de penser que, s'ils n'étaient pas ensemble dans l'UE, je pense qu'ils se referaient la guerre.
Surtout, l’Europe est jeune. Saviez-vous ce qu’étaient les Etats-Unis en 1826, 50ans après leur création ? Une contrée de bouseux ! Nous, on a 27 Histoires, et bien plus de langues et de cultures différentes. Comment construire un espace public européen sans opinion publique européenne ? Comment construire cette Europe sans espace médiatique où Barroso (le président de la Commission européenne) peut s’exprimer à 20h ?


Comment rendre l'Union Européenne moins ennuyeuse ?

Nous autres, journalistes, nous devons raconter la face cachée des textes européens. Je suis sûr que le côté people des relations entre Européens, l'angle anecdotique de l'information européenne, intéresseraient les lecteurs et téléspectateurs. Parce que le processus de décision à Bruxelles est tout sauf glacial ! Ici, on passe notre temps à manger et à parler mais où décèle t-on ce contact humain entre tous ces Européens dans les papiers des journalistes français ? Le problème, c'est que les Français ne savent pas mettre en scène l’Europe.

Pourquoi ? Les journalistes en poste à Bruxelles seraient-ils mauvais ?

Non, mais je pense que les journalistes en poste à Bruxelles sont dépassés par la technicité de l’information. Ils n’ont pas le recul nécessaire, pas assez de connaissances en droit, en histoire et ils ne travaillent pas assez pour combler leurs lacunes. La plupart ne reste que deux ans à Bruxelles, c'est bien trop peu ! Les gens ont besoin de plus de temps pour vous faire réellement confiance. Moi, ça fait plus de 15 ans que j’exerce à ce poste : cela me donne un certain recul pour traiter l’actualité. J'ai mis un moment avant de comprendre l'importance de Napoléon ou de la guerre de Trente ans pour analyser la politique européenne actuelle.





Comment travaillez-vous avec les journalistes étrangers ?

On a crée un club francophone de journalistes spécialisés sur l’Europe, avec des Anglais, des Turcs, des Polonais, des Italiens, des Belges et des Portugais.
Cela m'a donné beaucoup de contacts utiles, aujourd'hui je décroche mon téléphone et j'ai qui je veux. Surtout, cela permet de saisir comment travaillent les confrères étrangers. Au bout d'un moment, on comprend que si l'on a besoin d'un document, il faut mieux aller le demander aux Danois, qui sont très à cheval sur la transparence des textes, qu'aux Français.


Plus généralement, qu'est-ce que le rôle du journaliste, aujourd'hui, dans notre société ?

Un journaliste doit dépasser sa volonté d'être respectable, d’être invité en ville. Il a le devoir de déplaire. Oui, faire de l’information, c’est déplaire. Un journaliste est là pour péter à table. Il est là aussi pour donner les bases fondamentales nécessaires pour comprendre l'UE aujourd'hui. Avec mon blog, j'ai vu que la stratégie économique de l'Euope était complètement méconnue : un journaliste doit chercher, par tous les moyens, à a y remédier.

samedi 22 mars 2008

Retard...

Ouh là là
Paraît qu'un blog, ça s'entretient à raison d'un post tous les trois jours, et voilà : je suis de retour après...un mois !
Pendant ce temps là, j'ai bossé sur les municipales dans le Nord de la France. Le résultat sur le blog Tout sur mon maire, descendez un peu et vous pourrez lire le super journal Free Candle.
Bonne lecture et à plus tard pour un retour de l'actu européenne !

jeudi 14 février 2008

Ayaan Hirsi Ali énerve les Pays-Bas

Grincements de dents aux Pays-Bas. Ayaan Hirsi Ali a été reçue aujourd'hui jeudi 14 février par le Parlement européen, à Bruxelles. Elle était invitée par plusieurs députés socialistes français, dont Benoît Hamon, l'initiateur d'une déclaration écrite sur la prise en charge par l'Union européenne de sa protection. Un texte signé par une centaine d'eurodéputés.
2 millions d'euros par an

Aux Pays-Bas, la médiatisation de l'ex-parlementaire (voir article précédent) énerve. Non que le gouvernement néerlandais soit contre l'idée de ce fonds européen, mais il tient à rappeler "que Mme Hirsi Ali a choisi volontairement de s'exiler et ne pouvait exiger ni des Etats-Unis ni de son pays qu'ils assument le coût de sa protection, estimé, selon le ministre de la justice néerlandais, à 2 millions d'euros par an." (dixit LeMonde)

La presse néerlandaise est elle aussi divisée. Des commentateurs, de gauche comme de droite, réunis par leur méfiance à l'égard de la France, se gaussent du soutien apporté par des intellectuels et des hommes politiques français à Mme Hirsi Ali. Sylvain Ephimenco, éditorialiste du quotidien chrétien Trouw, juge, en revanche, réconfortant "le fait que, grâce à des intellectuels français, la gauche ait retrouvé ses valeurs universelles, foulées au pied aux Pays-Bas".

mardi 12 février 2008

Ayaan Hirsi Ali : bientôt française ?

Ayaan Hirsi Ali. Vous avez peut-être déjà entendu ce nom. Normal, ces derniers jours, cette femme soudanaise est apparu sur tous les écrans. Ayaan Hirsi Ali est condamnée à mort dans plusieurs pays musulmans, dont le Soudan. Son « crime » ? Avoir critiquer vertement l’islam, alors qu’elle était députée des Pays-Bas.

Pour les anglophones, je vous laisse découvrir cette interview d’ Ayaan Hirsi Ali.





Pour les non-anglophones (!), résumons.

Après avoir eu une jeunesse de musulmane opprimée (excisée, voilée, mariée de force), la jeune femme suis son père, Hirsi Magan, un intellectuel qui a étudié aux États-Unis dans les années 1960, dans un long exil politique, d'abord en Arabie saoudite et en Éthiopie puis au Kenya. Elle est ensuite envoyée en Allemagne où elle est hébergée par sa famille en attendant d'obtenir les documents nécessaires pour pouvoir se rendre aux Etats-Unis en vue d'y être mariée. Elle a 22 ans. D'après RFI, ses parents proches et son ex-mari, un Somalien installé au Canada, s’accordent tous pour dire qu’elle était consentante le jour de la cérémonie.

Elle s'enfuit alors vers les Pays-Bas, où elle obtient l'asile politique en 1992 (en mentant sur son âge et sa situation - elle dit avoir connu les atrocités de la guerre civile en Somalie alors qu'elle était au Kenya au même moment, un pays en paix où elle avait déjà le statut de réfugié). À partir de 2001, chercheuse dans un think tank (groupe de recherche) du Parti des travailleurs aux Pays-Bas, elle travaille sur l'intégration des femmes étrangères (et plus particulièrement musulmanes) dans la société néerlandaise. En novembre 2002, elle adhère au parti libéral VVD où ses idées provocantes sont plus acceptées. Elle est élue au Parlement en 2003. Elle réussit alors à faire adopter une proposition de loi réprimant sévèrement la pratique de l'excision. Son crédo ? PROVOQUER : en 2002, elle qualifie l'islam de "culture rétrograde", choque de nouveau en 2004 en parlant de Mahomet comme d'un "pervers" et un "tyran", et assimile même l'islam à un "nouveau fascisme" dans un récent entretien avec The Independent.


Rencontre avec Théo Van Gogh

Autre point important du parcours d’Ayaan Hirsi Ali : sa collaboration avec Theo van Gogh, débutée en 2004. Ils écrivent ensemble le scénario d'un court-métrage portant sur la condition des femmes dans le monde musulman, en insistant sur les violences qui sont faites aux femmes au nom de l'islam. Le film est baptisé Soumission et raconte l'histoire d'une fille violée et battue par sa famille. Ce film provocateur, où des calligraphies du Coran, livre sacré des musulmans, sont inscrites sur la peau des actrices, entraine la colère des musulmans hollandais. Après l'assassinat de Theo van Gogh, le 2 novembre 2004, Ayaan Hirsi Ali est menacée de mort.

Polémique. Ayaan Hirsi Ali est également au centre d’un documentaire diffusé à la télévision néerlandaise. Elle y reconnaît avoir menti sur son identité et son âge pour obtenir l'asile politique et échapper à un mariage forcé. La ministre de l'intégration Rita Verdonk, bien que membre comme elle du VVD, tente d'utiliser ce fait pour la déchoir de sa nationalité, mais échoue face à une motion des députés votée à la majorité. Face à cette polémique, la jeune femme soudanaise, surnommée "la Voltaire des temps modernes", en référence aux combats passionnés de ce dernier contre le cléricalisme, démissionne de son siège de député et s'exile aux Etats-Unis.
Elle y est recrutée par l'American Enterprise Institute, un think tank néoconsevateur proche de l'administration Bush. Rita Verdonk, désavouée par son parti et l'opinion publique, renonce tout de même, en juin 2006, à déchoir de ses droits civiques Ayaan Hirsi Ali. Rita Verdonk parvient néanmoins à user de certaines lois pour contraindre le gouvernement à retirer, en octobre 2007, la protection rapprochée qu'il avait accordée à Ayaan Hirsi Ali. La raison ? Le fait qu’elle ne soit plus sur le territoire national. Le gouvernement américain ne peut pas non plus lui accorder une protection, Ayaan n'étant pas de nationalité américaine. Aujourd’hui, elle est contrainte de financer elle-même sa protection privée.





Ayaan Hirsi Ali française ??

Beaucoup plaident pour la naturalisation française d’ Ayaan Hirsi Ali, prenant au mot Nicolas Sarkozy qui, au soir de son élection, s’était exclamé : "A chaque femme martyrisée dans le monde, je veux dire que la France offre sa protection en lui donnant la possibilité de devenir française." Alors quid d'une future naturalisation ? Par la voie de Rama Yade, l’Elysée aurait transmis un « Nous y réfléchissons ». Nicolas Sarkozy a également annoncé vouloir mettre en place "un fonds communautaire" pour assurer la protection des personnes menacées. Reste à percevoir la différence entre une énième annonce politique et la réalité.



lundi 11 février 2008

Belgique -- De la publicité pour lutter contre l'alcoolisme

Une pub belge sur la prévention des ravages de l'alcoolisme chez les femmes enceintes...


Sarko et les référendums européens

Nicolas Sarkozy est intervenu hier soir, sur les radios et télés françaises. A l'ordre du jour, une fois n'est pas coutume, l'Europe. Et le fameux traité de Lisbonne dont je parlais jeudi dernier. Un traité qui ne reprendrait, je cite, que les principes institutionnels de l'Union européenne. Son intervention a soulevé plusieurs points intéressants : sa vision de la concurrence qui ne doit "pas être une fin en soi mais un moyen" ou encore sa volonté de "remettre de la politique en Europe".


Mais passons les détails du texte. Le plus frappant, à mon avis, c'est la capacité que Sarkozy a eu de tirer la couverture à lui et à la France : "C'est la France qui a pris l'initiative de le proposer" (le traité de Lisbonne). A peine un mot pour la chancelière allemande, Angela Merkel. "La France est de retour en Europe. Elle retrouve le rôle moteur qui a toujours été le sien". Pourquoi pas mais interrogeons-nous : tant mettre en avant la France (et lui-même), est-ce le meilleur moyen de redorer l'image de l'Europe ? N'était-ce pas l'Europe, les institutions, la collaboration entre les différents Etats membres qu'il fallait mettre en avant ?

Autre chose sur lequel Sarkozy a insisté : l'adoption française du traité de Lisbonne par la voie parlementaire. Il a ré-affirmé avoir été élu en ne cachant pas son refus de refaire un référendum sur la question européenne: une promesse de campagne réalisée, donc. Seulement, magie de l'histoire, regardez ce que disait Sarkozy en 2004 (ok, ce n'est pas le même contexte, ok :)




jeudi 7 février 2008

Le Traité de Lisbonne comparé au traité constitutionnel

Et comme je suis dans ma journée "je vous livre des trucs que j'ai pas écrit mais que je trouve intéressants", voilà une comparaison faite par Le Monde y'a déjà quelques semaines entre les deux traités : le traité constitutionnel, refusé par une majorité de Français en 2005, et le traité de Lisbonne, ratifié cette semaine par le parlement français. Cette fois, seule l'Irlande a pris le risque du référendum. Fallait-il ou non organiser un nouveau référendum en France ? Question difficile. D'un côté, si le "oui" avait gagné, cela aurait renforcé l'image de l'Europe en France, et les Français se seraient intéressés à ce nouveau traité - ce qui n'est pas le cas actuellement. D'un autre côté, c'était prendre le gros risque de bloquer une nouvelle fois les institutions européennes, et de voir l'Union européenne poursuivre sans la France.

La première grosse différence, c'est que le traité de Lisbonne amende les traités existants mais ne les remplace pas (ce que devait faire le traité constitutionnel). Bref, voilà ce que retenait Le Monde :



Ce qui a disparu par rapport au texte constitutionnel

- Le terme de Constitution.
- La référence aux symboles, même si ceux-ci continuent d'exister : le drapeau aux douze étoiles, l'hymne (l'Ode à la joie), la devise ("L'Union dans la diversité"), et la mention "La monnaie de l'Union est l'euro". (cf les propos de Geremek, dans un article publié en janvier, où le député européen polonais regrettait cette absence)
- La partie III du traité constitutionnel fixant les politiques et le fonctionnement de l'Union. Ses articles, portant sur le marché intérieur, la concurrence, l'agriculture, l'Union monétaire, la coopération judiciaire et policière, etc., retrouvent leur place dans les traités existants, que la Constitution devait remplacer.



Ce qui est maintenu


- Les principales innovations institutionnelles : la présidence stable de l'Union pendant deux ans et demi, au lieu d'une présidence tournante du Conseil tous les six mois (On parle d'ailleurs de Tony Blair pour être nommé à ce poste, affaire à suivre); la composition réduite de la Commission européenne.

- L'extension des domaines à majorité qualifiée (apparté : depuis le 1er janvier 2007, le nombre de voix attribué à chaque État membre a été repondéré ; le seuil de la majorité qualifiée est fixé à 255 voix sur 345 (73.91 %). La décision doit également recueillir le vote favorable de la majorité des États membres (soit au moins 14 Etats membres). En outre, un État membre peut demander qu'il soit vérifié que la majorité qualifiée comprend au moins 62 % de la population totale de l'Union européenne. Si tel n'est pas le cas, la décision n’est pas adoptée. Au fur et à mesure des différentes réformes institutionnelles, le vote à la majorité qualifiée a remplacé le vote à l'unanimité, ce qui est bien plus efficace).


- Une augmentation des pouvoirs du Parlement européen. Afin de rassurer le Royaume-Uni, qui craignait de nouveaux transferts de souveraineté, elle s'accompagne de la mise en place d'un mécanisme destiné à faciliter les coopérations renforcées entre les Etats désireux d'aller de l'avant.

- La délimitation des compétences entre l'Union et les Etats membres : l'Union douanière, le commerce, la concurrence, la politique monétaire demeurent des compétences exclusives de l'Union. La politique sociale, le marché intérieur, l'énergie, la recherche restent des compétences partagées avec les Etats.

- La personnalité juridique unique de l'Union est maintenue, avec la fusion des trois piliers qui permettaient de distinguer les politiques gérées selon les méthodes communautaires (1er pilier), la politique étrangère et de sécurité commune (PESC, 2e pilier) et la coopération judiciaire et policière (3e pilier). A la demande de la France et du Royaume-Uni, le caractère "intergouvernemental" de la PESC est cependant ancré dans le traité. Les Britanniques ne sont pas parvenus à dépecer les attributions de l'ex-ministre des affaires étrangères, rebaptisé "haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité". Il disposera, comme prévu par la Constitution, d'un service diplomatique, et conservera sa position à cheval entre la vice-présidence de la Commission et la présidence du conseil des ministres des affaires étrangères.

- Le droit d'initiative citoyenne, qui permettra à un million de citoyens d'inviter la Commission à soumettre une proposition.

- La référence aux héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe. (apparté encore -décidément, je peux pas m'empêcher de faire des commentaires - c'est quand même curieux qu'on enlève les synboles de l'Europe mais qu'on maintienne les références aux héritages culturels, religieux et humanistes, non ?!)




Ce qui est maintenu mais modifié


- La Charte des droits fondamentaux, qui constituait la partie II de la Constitution, ne sera pas reprise in extenso. Elle fait l'objet d'une référence lui donnant une force juridique contraignante. Ce qui revient au même selon les juristes. Le Royaume-Uni et probablement la Pologne sont exemptés de son application.

- A la demande du Royaume-Uni, la primauté du droit européen sur le droit national n'est pas réaffirmée dans le traité proprement dit. Mais ce principe fait l'objet d'une déclaration renvoyant à la jurisprudence de la Cour de justice.

- La règle de la double majorité, qui stipule qu'une décision doit être prise par 55 % des Etats membres et 65 % de la population, subsiste pour l'essentiel. Mais son application est reportée à 2014 à la demande de la Pologne. Pendant une phase de transition, de 2014 à 2017, un pays pourra demander de voter selon les règles du traité de Nice. De plus, un mécanisme permettra à un groupe d'Etats qui approche la minorité de blocage d'obtenir une poursuite de la négociation en vue d'une solution.

- Le rôle des Parlements nationaux est renforcé : la période qui leur est accordée pour examiner un texte passera de six à huit semaines. La Commission devra justifier une décision, la revoir ou la retirer, si elle est contestée à la majorité simple des voix attribuées aux Parlements nationaux.*

Ce qui est nouveau


- Un protocole sur les services publics, demandé par les Pays-Bas avec le soutien des Français, qui souligne l'importance des services d'intérêt général, met l'accent sur les "valeurs communes" de l'Union, mentionne "le rôle essentiel et la grande marge de manœuvre des autorités nationales, régionales et locales".
- Si les "critères de Copenhague" imposés aux pays candidats à l'adhésion ne sont pas mentionnés explicitement, comme le demandaient les Pays-Bas, le texte précise que "les critères d'éligibilité ayant fait l'objet d'un accord du Conseil européen sont pris en compte". "




En gros, la conclusion est simple : les deux traités ne sont pas aussi différents que Nicolas Sarkozy veut bien le prétendre. Reste à savoir comment ce traité va être appliqué et si cela va vraiment faire évoluer les institutions européennes, qui ont bien besoin d'un coup de pouce. Suite au prochain épisode.